Histoire

de la marbrure

 

Historique de la marbrure

Technique du Suminagashi

Le papier marbré, quelle que soit son origine présente des caractéristiques remarquables : les marbrures sont inimitables par leur unicité, elles sont sont aussi infalsifiables.

La toute première difficulté consiste à faire flotter les pigments sur un liquide, condition indispensable pour les transférer ensuite sur la feuille de papier.

Au Japon : le Suminagashi se développe au XIIe siècle

Sumi : encre et Nagashi: qui flotte sur l’eau en mouvement.

Développée dans la région d’Echizen, cette technique utilise de l’eau pure sur laquelle l’artiste fait flotter des encres de chine.Les gouttes d’encre sont déposées à la pointe du pinceau en taches concentriques. Les motifs se forment au gré d’un souffle d’air, de l’agitation d’un éventail ou de la création d’un courant. L’encre est ensuite transférée sur du papier de riz. Sous des abords d’une étonnante simplicité, le suminagashi dissimule de fines complexités. Au delà de son aspect décoratif et artistique, cette technique est aussi utilisée par les moines bouddhistes comme technique de méditation, pour connecter le geste, le mouvement, avec la nature.

En Turquie : l’Ebrû se développe dès le XVe siècle

Ebrû signifie “art des nuages”.

L’abstraction du papier ebrû favorise son adoption par l’islam qui en fait le support de prédilection de ses écritures saintes.

Les couleurs sont naturelles, mêlées à du fiel de bœuf et déposées sur un bain d’eau épaissi par une colle végétale, comme de la gomme adragante par exemple.

Ces papiers servent aussi bien à la calligraphie qu’au revêtement intérieur des malles et des coffres ou à l’ornement des livres et de toutes sortes de petits objets.

La difficulté à obtenir un dessin figuré était  telle qu’il fallut patienter jusque dans les années 1910 avant que des calligraphes parviennent à marbrer des motifs floraux très réalistes.

En Inde : au XVIIe siècle,

la combinaison de plusieurs techniques perses et indiennes permet la réalisation de motifs complexes faisant intervenir plusieurs bains de marbrures, des pochoirs et des systèmes de caches à base végétale ou mucilagineuse.

En occident : au XV°siècle,

les voyageurs découvrent cet art à la faveur de la prise de Constantinople en 1453 et des échanges commerciaux et culturels qui s’ensuivent.

L’engouement pour les papiers marbrés – alors souvent désignés sous le terme de « papiers turcs » – se manifeste dans les libri amicorum (les livres d’amis) apparus dans le second tiers du XVIe siècle.

C’est en Allemagne que les premières productions apparaissent au tout début du XVIIe siècle puis elles sont exportées chez ses voisins pour atteindre un niveau de production considérable au XVIIIe siècle.

En France, les cartiers et les dominotiers se disputent cette activité avant que le XVIIIe siècle reconnaisse et distingue les particularités de l’activité de marbreur sans pour autant jamais leur accorder de corporations.

L’art de la reliure inaugure dès la fin du XVIe siècle cet usage voué à perdurer plusieurs siècles, accompagnant le développement du livre jusqu’à son industrialisation.

Les papiers marbrés sont enfin de facture française sous le règne de Louis XIII. C’est au relieur du roi Macé Ruette qu’est attribuée la paternité de la marbrure française que l’on applique sur le contre-plat du livre puis sur les gardes volantes à partir de 1661 – 1680.

Dès le début du XVIIe siècle, les relieurs entreprennent de marbrer les tranches des livres.

 

Au XIXe siècle, les prodigieux progrès de la chimie élargissent les palettes des peintres et des marbreurs.  À cela s’ajoute de nouveaux produits dont l’utilisation empirique va encore permettre l’invention de nouveaux motifs.

À la même époque, à Budapest, Josef Halfer rédige et publie en 1886 un ouvrage qui préservera dans les moindres détails les subtilités d’un art durement acquis. Son ouvrage d’abord paru en allemand sous le titre de Die Fortschritte der Marmorierkunst (Les progrès de l’art de la marbrure) devient au XXe siècle la bible des marbreurs.

 

Au XX° siècle, en France, Marie-Ange Doisy rédige deux ouvrages de référence sur la Marbrure, traitant de l’histoire et des techniques, “Le papier marbré” avec Stéphane Ipert, éditions Technorama, 1985 et “De la dominoterie à la marbrure”, éditions Arts et Métiers du Livre, 1996.